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N.u.l.l.e.
9 juin 2008

Ri-di-cu-le

Une reine pas très catholique : une biographie d'Anne Boleyn
Dominique Muller (1996)

Une reine pas très catholique

Pendant mon absence virtuelle, j'ai eu l'envie saugrenue d'aller au cinéma; on fêtait le festival de Cannes, toutes les séances étaient à trois euros, merveilleux, on a l'impression de prendre moins de risques si le film ne nous plaît pas. Je suis allée voir Deux soeurs pour un roi (ne vous moquez pas !). Comme on pouvait s'y attendre, ce n'était pas le film de l'année, mais voilà, les larmes de la reine, Anne Boleyn (jouée par la délicieuse Natalie Portman), ont retenu mon attention. Il lui fallait donner un fils au roi, ou elle n'était plus rien - cette nécessité absolue d'enfanter un héritier mâle était somme toute banale, mais terrible. Ça a suffit pour que je veuille en apprendre plus sur le destin tragique d'Anne Boleyn.
Si j'avais su !
Mais pour ceux qui n'auraient pas vu le film et qui n'auraient pas emprunté dans les 24h suivantes une biographie d'une inutilité flagrante, je consens à expliquer un peu plus de quoi il s'agit.
Henri VIII (1491-1547) fut le sémillant roi d'Angleterre, de 1509 à sa mort. Sans rentrer dans les détails, il est quand même bon de rappeler qu'il a eu un succès impressionnant auprès de la gente féminine (six épouses, et combien de maîtresses ?), qu'il est le fondateur de l'anglicanisme et qu'il portait plusieurs bagues à chaque doigt. Vous savez l'essentiel.
Sa première épouse, Catherine d'Aragon, n'est pas une femme très drôle, surtout qu'un seul de ses enfants survit, et c'est une fille; mais enfin, c'est l'épouse du roi et elle le reste, quand bien même le petit Henri batifolerait avec d'autres dames de la cour.
Dont Anne Boleyn.
Anne est une fille très spéciale; selon les sources, on la dit très laide ou très belle (la seconde hypothèse est plus probable : le roi s'encombrerait-il d'une fille moche ? allons donc !). On dit qu'elle avait une peau très mate (ces portraits ne montrent rien de tel, mais soit...), qu'elle était maigre, qu'elle avait un long nez et onze doigts. Passionnant, n'est-ce pas (ce qui est fort drôle, en revanche, est que de nombreux amateurs d'histoire dissertent sérieusement là-dessus). Donc c'est une fille particulière, la petite dernière de trois enfants; sa sœur a déjà eu une liaison avec le roi, alors pourquoi ne pas tenter sa chance ? Seulement, Anne Boleyn ne veut pas être la favorite pendant quelques semaines, et ensuite accoucher d'un bâtard. Son rêve, c'est d'être reine à la place de la reine. Sauf qu'à l'époque, il faut de sérieux motifs pour divorcer; Henri VIII, pressé de goûter aux charmes de la petite Boleyn, rétorque que sa femme ne lui a pas donné d'héritier mâle. Mais le pape n'accorde pas le divorce, ça crée une brouille terrible, le roi rompt tout lien avec la papauté et décide de devenir le seul chef de l'Eglise d'Angleterre.
Henri VIII et Anne Boleyn se marient. Par manque de chance, Anne accouche quelques mois plus tard d'une petite fille. C'est la déception dans tout le royaume. A partir de ce moment-là, Henri se délaissera de plus en plus de sa femme, qui ne vaut pas mieux que la première (on ne peut pas lui en vouloir d'être aussi déçu, il ne peut pas prévoir que cette petite fille,
Elisabeth, allait un peu diriger le pays par la suite). Le roi vieillit mais s'intéresse toujours aux courtisanes, il chasse, il boit, il mange, il fait un second enfant à Anne Boleyn qui, la malheureuse, fera une fausse couche. On dit qu'elle porte malheur, qu'elle paie les horreurs du passé (elle n'a pas été très tendre avec la première reine), le roi s'ennuie et se lasse, ne pourrait-il pas en épouser une autre ? Mais l'excuse de l'absence d'héritier mâle risque d'être redondante, il faut trouver autre chose. Heureusement qu'il est bien conseillé, le roi, et le voilà en train de dresser des accusations plus ou moins douteuses contre sa seconde femme. Anne est accusée d'adultère, d'inceste (avec son frère), d'avoir conspiré pour assassiner le roi, bref, d'être une sale sorcière dont il faut vite se débarrasser. Le procès sera caduque : coupables ou innocents, on s'en fiche, les sujets liés à l'affaire seront tous exécutés, Anne décapitée.
Suite à cet exposé, vous allez penser que je n'ai pas toutes les qualités requises pour devenir professeur d'histoire (et quelque part, ça me soulage). Où sont les faits, les dates ? les tensions politiques ? Ils sont dans le bouquin, mais honnêtement, c'était si mal écrit, si mal expliqué, si ennuyeux, que je n'ai rien retenu. Toutes les affaires entre Henri VIII, Charles Quint et François Ier dépassaient mon entendement.
Ce livre n'est pas bon; les inventions de l'auteur (des dialogues, des pensées, dont la vraisemblance paraît douteuse) sont horripilantes; c'était sans doute dans un but de "vulgariser" l'Histoire, la rendre accessible à ceux qui sont incapables de retenir la moindre date, le moindre événement, mais c'est raté. J'ai malgré tout tenu jusqu'à la fin, pour pouvoir le déconseiller en connaissance de cause, et parce que la fin m'intéressait plus particulièrement. Quelle abnégation de ma part... on ne m'y reprendra pas.

Je me permets une dernière allusion au travail de l'auteur, en citant un bref passage :
« Ici, on attend de savoir si Sa Majesté rit pour oser rire. Personne n’a l’audace de contrecarrer ses caprices : récemment, il est apparu chaussé de cuissardes d’hiver, emmitouflé des pieds aux épaules dans un manteau fourré, pour entraîner ses gentilshommes dans une chasse improvisée, bien qu’il plût chats et chiens, sans laisser à quiconque le temps de se vêtir plus commodément. »
Ça m'a fait rire; je croyais que le traducteur était assez mauvais pour ignorer que des animaux domestiques tombaient rarement du ciel lors d'une averse française. Mais c'est presque pire que ça : en commençant ce billet, j'ai cherché le nom du traducteur. Je ne l'ai pas trouvé : l'auteur (une femme) est tout simplement française. Ça me laisse perplexe. A-t-elle volontairement parlé de chats et chiens, pour faire un trait d'humour ? Ou elle a traduit à sa manière des propos qu'elle aurait trouvés ailleurs ?

Qu'importe, finalement. L'essentiel est que le monde entier (au moins) est désormais prévenu : si vous voulez vous informer sur le sujet, je vous conseille plutôt les articles de Wikipédia (Henri VIII et Anne Boleyn), ils sont plus courts, plus intéressants, et mieux écrits.
 

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Commentaires
E
Oui, le sujet est passionnant, et c'est là tout l'art de l'auteur : elle le rend affreusement soporifique ! Ouvrons plutôt d'autres livres, où les chats et les chiens restent sagement sur leur tapis... ;-)
K
Humph! Shocked! "it's raining cats and dogs", équivalent de notre "il pleut des cordes"... m'enfin c'est quoi, cette traduc' en bois?? Cette anecdote est la cerise sur le gâteau, après tout ce que tu avais déjà dit sur ce livre... Dommage, car je trouve le sujet passionnant.
E
Ah ah, j'ai trouvé ! Je le regarderai demain (en tout cas, le titre en lui-même me tente vraiment, mais c'est toujours comme ça avec le monde médiéval : a priori, ça retient mon attention, et ensuite, je me rends compte que c'est une littérature qui n'est pas pour moi...)<br /> Et ton directeur de recherche n'est malheureusement plus là, je n'ai jamais entendu parler de lui... <br /> Je comprends tes appréhensions face au milieu universitaire, c'est vrai que c'est très particulier... Et comme c'est bon de savoir qu'on marque positivement des élèves ! C'est une autre ambiance, et je crois que le dialogue est plus facile avec des ados qu'avec des étudiants qui découvrent la liberté, et donc l'inutilité d'assister à tous les cours... Je te souhaite sincèrement d'avoir de meilleures classes l'année prochaine, et je te trouve bien courageuse... you're the best ! :o)
F
Ton intérêt me fait rire! Si tu veux lire mon mémoire, c'est facile, tu connais mon nom... Tiens, je em demande si mon directeur est toujours là ou à la retraite... Pour l'article, c'était pour un colloque, il est dans les Actes. Quant à la fac, je ne sais pas, je trouve l'enseignement un peu "déconnecté" : il faut faire beaucoup de recherche, le milieu est très clos, il y a tellement peu de postes que c'est un peu la quête du Graal (même si en médiéval il y a moins de monde qu'en XXème, certes). Je ne suis pas prête à me battre et à m'entremettre pour bosser : l'agreg au moins c'est clair : tu l'as, tu bosses. Et j'aime bien les ados (quand ils sont "normaux" s'entend et pas fous furieux comme cette année)... J'ai vraiment l'impression d'avoir compté pour certains, c'est gratifiant.
E
Ah mais j'adore quand tu racontes ta vie ! Tu as fait ta maîtrise au Mirail, dis ? Mon dieu, si tu me disais en privé ton nom de jeune fille, ou ton sujet, je pourrais y jeter un œil !! Et ton article, il a été publié dans quelle revue ? Tant que j'y suis, pourquoi l'enseignement universitaire ne t'intéressait pas (à cause des étudiants poussiéreux, justement ?) ?
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