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N.u.l.l.e.
29 avril 2009

Dans les profondeurs bleues de la mer

Je ne sais pas si vous avez déjà remarqué, mais à chaque qu'on annonce la sortie d'un film d'Hayao Miyazaki, les médias ne parlent pas de "son nouveau film", non, ils disent systématiquement "son nouveau chef-d'œuvre".
Comme s'il ne faisait que ça ! Comme s'il ne se trompait jamais, Hayao ! Alors qu'il ne sait même pas dessiner un poisson rouge normal.

20080628_ponyo
La preuve !

Ponyo sur la falaise, donc, est le dernier chef-d'œuvre de Miyazaki, et soyons honnête : encore une fois, le compliment n'est pas volé. C'est impressionnant d'imaginer que quelque part dans le monde, il y a un homme aussi créatif et aussi talentueux que lui. De tous ses films que j'ai vus, pas un ne m'a pas déçue, pas un n'est raté. Remarquable.

Ce dessin animé reste proche de ses préoccupations habituelles - de la poésie (à foison), un zeste d'écologie (la nature peut, à n'importe quel moment, reprendre ses droits et détruire l'œuvre humaine), du monstrueux (ces vagues gigantesques qui avalent les routes, recouvrent la ville...), de la sensibilité...
Sosuke est un petit garçon de 5 ans, qui ne vit la plupart du temps qu'avec sa mère (son père est un marin); un beau jour, un petit poisson rouge échoue là où il joue. Évidemment, il l'adopte de suite : la petite créature est baptisée Ponyo.
Seulement voilà, Ponyo n'est pas un poisson rouge comme les autres, déjà parce qu'elle a une tête humaine  (voyez l'image au-dessus). Elle est en effet la fille (car oui, c'est une fille) d'un sorcier autrefois humain (qui vit désormais dans les profondeurs de l'océan) et de la déesse de la mer. Ponyo devrait se satisfaire de sa vie de poisson, en compagnie de ses innombrables sœurs...
Mais Ponyo est rongée par cet héritage humain qui est le sien malgré tout, et quand elle rencontre Sosuke, elle n'a plus qu'un désir : être humaine, et vivre avec lui !
D'obstacles en péripéties, elle y parvient... mais sa métamorphose réveille les forces maritimes - sans le vouloir, elle a ouvert les portes d'un autre monde... et tant qu'elles ne se refermeront pas, tant qu'elle ne fera pas le choix entre sa nature humaine ou sa nature animale, son sorcier de père n'abandonnera pas le combat.

Ça ne paraît peut-être pas très alléchant présenté comme ça, mais peu importe; la règle numéro un dans la vie est : Faisons confiance à Miyazaki et allons voir ses films même si l'idée de départ ne nous intéresse pas trop.
Je crois qu'on peut difficilement être déçu; même si le propos peut à première vue paraître moins profond que dans Princesse Mononoké par exemple, il me semble que c'est un leurre. La fausse naïveté des dessins (assez "enfantins", oserais-je dire) cache au contraire une sensibilité extraordinaire qui est mise en scène à chaque nouveau plan. Un travail prodigieux, de toute beauté. Je ne pourrais pas expliquer cela comme il faut, et j'en suis bien marrie. Quoi qu'il en soit, Ponyo sur la falaise est une nouvelle invitation de Miyazaki à entrer dans son univers, un nouveau voyage vers un monde tellement plus beau et plus sain que le nôtre...
Certaines scènes sont terrifiantes; la tempête est remarquablement dessinée, j'étais moi-même mal à l'aise devant ce spectacle de vent, de pluie, de déchaînement maritime. Les vagues deviennent vivantes, prennent la forme d'énormes poissons aux couleurs sombres, ils courent et rattrapent les humains pour les engloutir, pour récupérer cette petite fille ponyo_new_twitch4si aventureuse... On est effrayé pour le père de Sosuke, qui est justement en mer. La nuit est si noire... puis surgit quelques lumières - un faisceau lumineux doré... la déesse de la mer contemple la beauté de son monde et vient apaiser ceux qui en ont besoin (et je peux vous dire que cette déesse est tout simplement féerique, hypnotisante...).
Pendant tout le film, on assiste à l'épanouissement de Sosuke et de Ponyo qui, quand ils sont ensemble, décuplent leurs forces (et je ne dis pas ça uniquement parce que la petite fille mi-poisson mi-humaine a des pouvoirs magiques) et sont prêts à affronter des épreuves parfois initiatiques. Comme si, quelque part, leur jeune âge leur permettait de ne pas avoir conscience totalement du danger et des enjeux, comme si, finalement, leur fraîcheur ouvrait devant eux le monde des possibles, où les barrières sont faites pour être franchies sans peur...
Leur cheminement presque aveugle (c'est comme cela que je le ressens - ils ne semblent pas avoir conscience des enjeux) devient finalement douloureux pour leur entourage : pour Fujimoto, le père de Ponyo, et pour Risa, la mère de Sosuke. Fujimoto est déchiré à l'idée de perdre sa fille, de la voir prendre forme humaine pour le restant de ses jours. Selon lui, il faut renoncer au monde des hommes, et enrichir les esprits de la nature... Risa, elle, accepte les événements tels qu'ils se produisent, mais je trouve que les scènes finales peuvent s'interpréter de différentes manières, et quand je vois cette immense bulle, ce coin discret où Risa partage des secrets avec la déesse de la mer, je me dis que quelque chose se brise à ce moment-là...

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Ponyo sur la falaise est clairement une réinvention du mythe de La petite sirène, mais Miyazaki se réapproprie tellement cette histoire pour la faire sienne qu'on assiste à une œuvre entièrement nouvelle et fabuleuse. Ses dessins n'ont rien perdu de leur puissance, sa poésie est toujours intacte, aussi pure et attirante que dans ses films précédents. Hayao Miyazaki est un enchanteur et ça ne cesse de m'éblouir. Une heure quarante de grâce, cela ne se refuse pas; savourez bien. L'art de Miyazaki est précieux.

Les avis de Papillon, Leiloona et Sylvain Rivaud. J'ajoute Yohan même s'il n'a pas aimé Princesse Mononoké, ce qui est blâmable mais que voulez-vous, je suis si gentille...
Je vous conseille également de jeter un oeil à cette
conversation sur Allociné, où le traducteur (pour la VF) intervient, et apporte de passionnants éclairages (notamment sur le nom même de "Ponyo" qui m'intriguait (tout le monde est amusé, dans le film, quand le nom est prononcé), sur la relation de Sosuke avec ses parents (il ne les appelle jamais "papa" ou "maman"...), etc).
+ Une superbe étude sur la genèse du dessin animé, les personnages et mille autres choses (mais à ne lire que quand on a vu le film, bien sûr)   

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Commentaires
E
Romanza, oui, ça m'intéresse, bien sûr ! Je viendrai te lire tout à l'heure :-)
R
Hum ... Comme j'ai aimé moi aussi! comme tous les autres Miyazaki d'ailleurs!<br /> J'en parle sur mon blog si ça t'intéresse, je t'invite???
E
* George Sand et toi, c'est très bien que ton fiston te réclame pour le cinéma, tu devrais te régaler toi aussi !<br /> <br /> * Bladelor, you're welcome !
B
Merci pour ta réponse !
G
J'y vais dimanche matin avec mon fils de 5 ans qui l'a déjà vu mais qui veut le revoir !!! tant mieux ça me donnera l'occasion de le voir !
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