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N.u.l.l.e.
18 novembre 2009

L'enfer est un endroit solitaire

Depuis que j'ai ouvert ce blog, je me dis : Un jour, je leur parlerai de Bukowski.
Et les jours passent.
Et je pense : A quoi bon ? Ce serait trop difficile - de trouver les mots, de susciter l'envie, de le présenter le plus convenablement possible.
Bukowski est mon ami, il l'est devenu au détour d'une chambre u où je n'avais rien d'autre à faire qu'écouter ma voisine Lorie s'engueuler avec son copain. Je le trouvais tellement génial, Bukowski, que je buvais le soir du rhum dégueulasse (je n'y connaissais rien, en alcool, j'avais choisi une jolie bouteille et c'est tout) en pensant à lui. Il m'a fait hurler de rire, il m'a brisé le cœur. Parce que Bukowski, ce n'est pas qu'une façade de provocation. Sexe, alcool, chambres minables et machine à écrire. C'est aussi un gars qui te met un uppercut au moment où tu t'y attends le moins.
Bukowski, c'était un grand.

bukJe n'avais pas encore feuilleté mon merveilleux bloc Journal, souvenirs et poèmes, cadeau commercial tombé dans ma boîte aux lettres. Je m'étais contentée de l'ouvrir au hasard, de tomber sur un poème, de le découvrir en le lisant à voix haute. Ça parlait de putes, de femme et d'amour. C'était tellement beau que ça m'a pétrifiée; j'ai corné le bas de la page (j'aime faire ça) en me disant que je vous recopierai ce poème.
Jusqu'à ce que je lise celui de la page d'à côté.
Jusqu'à ce que je lise les titres d'autres poèmes, que je vois ce que le recueil contenait d'autre.

Journal d'un vieux dégueulasse, le livre que j'aurais volontiers emporté sur une île déserte (mais plus maintenant, je ne suis pas bête, je choisirais plutôt mon gros recueil rouge sang), Le ragoût du septuagénaire (je n'ai jamais autant écrit dans un livre que dans ma petite édition de poche. Autant corné de pages. Autant encadré de passages, au stylo), Souvenirs d'un pas grand-chose (où l'on découvre que Buk aussi, a été adolescent. Et que toute adolescence est mieux que la sienne), Le capitaine est parti déjeuner et les marins se sont emparés du bateau (oui, c'est un titre. Le journal que je connais le moins bien, que j'avais emprunté à mon ancienne bibliothèque, un peu comme un trésor. Ça en était un).
Ceci pour les journaux, les souvenirs, les chroniques.
Puis les poèmes, les deux recueils introuvables en français, L'amour est un chien de l'enfer - ainsi que Jouer du piano ivre comme d'un instrument à percussion jusqu'à ce que les doigts saignent un peu (si ce n'est pas un titre sublime, ça, qu'on me pende par les pieds pendant trois minutes). Lire les poèmes de Buk, quand on n'est pas anglophone, relève du parcours du combattant (bien que, oui, oui, Le ragoût du septuagénaire en contient. Et quels poèmes !); je suis contente de ne pas avoir eu à me battre.
Je me demande si on peut encore se sentir seul(e) quand on a ce genre de livre dans sa bibliothèque. Près de soi. Un livre à malmener pour prouver qu'il a vécu. Je déteste que mes ouvrages bukowskiens restent lisses, impeccables, sans pli sur la tranche (même si je sais, aussi, qu'abîmer celui-ci me fait déjà mal en pensées. Y aller progressivement. En douceur).

Ce n'est pas encore aujourd'hui que je vais vous parler de Bukowski, je manque de temps, de courage. D'envie, aussi, parce qu'il y a des choses qui se partagent difficilement. Des choses pour lesquelles je n'ai pas envie de faire l'effort de partager.
C'est ainsi, la vie d'une lectrice. Une vie gorgée d'égoïsme et de plaisirs solitaires. Puis peut-être que c'est comme ça que je dois lire son épitaphe,
à Charlie : N'essaie même pas de parler de moi.
Ok. Je me tais. Et partons en voyage.

          nous goûterons aux îles et à la mer

     je sais qu'une certaine nuit
     dans une certaine chambre
     mes doigts
     caresseront
     bientôt
     une douce
     et claire
     chevelure

     il y aura des chansons comme aucune radio
     n'en a joué

     avec de la tristesse partout, et
     tout ça se mélangera.

...

C'était le poème de la page d'à côté.

Pour les curieux : la liste des principaux livres de Bukowski trouvables en français

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Commentaires
E
* Zorglub, oui, oui, les romans... Je vais y venir, bientôt, avec "Le postier" (histoire de commencer par le début). J'en parlerai !
Z
Bel hommage pour ce cher Hank !<br /> Mais il est temps de lire ses romans ...
E
* Fantômette, je t'envie terriblement ;-)<br /> Mais justement, quand tu écris sur mon blog, ne te sens pas obligée de continuer à interroger professionnellement, je ne voudrais pas que tu te surmènes trop !!<br /> <br /> * Ankya, ah oui, je te confirme, vire ça ! Ou avant, engueule-les par mail. Puis enlève tant que tu ne reçois rien. Non mais.
A
Pour ma part je n'ai pas encore reçu mon cadeau commercial... je sens qu'un lien va vite virer de mon blog...
F
Vois-tu, j'ai un métier fantabuleux qui consiste - entre autres - à poser des questions enquiquinantes. C'est chouette, non ?
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